Le blog de Salmacis








LE MAITRE D'ÉCOLE. - A l'époque où j'entrai à l'Université, et cela ne nous rajeunit pas, - j'avais quinze ans - j'ignorais tout des femmes ou peu s'en faut. Je me représentais vaguement l'amour sous la forme des scènes touchantes de Paul et Virginie dont j'avais eu entre les mains un exemplaire sans les gravures.
Un de mes camarades, du diable si je me rappelle son nom ! Wolfgang ou Conrad, plus ouvert à ces sortes de choses que je ne l'étais moi-même, voulut me conduire un jour dans une brasserie où fréquentaient des femmes débauchées.
Mais la timidité naturelle à mon âge me retint de l'y accompagner. Et comme mes besoins se faisaient sans cesse plus vivement sentir je ne tardai pas à contracter une de ces funestes habitudes que l'hygiène réprouve, mais qui n'en est pas moins propre à maintenir l'homme dans les lisières de la pureté divine.
On rapporte même que de purs esprits, jugeant ce moyen malgré tout peu convenable, préférèrent se mutiler, ainsi qu'il est d'usage dans nos campagnes de le faire au bétail...



MONROC. - L'encorné soit de Dieu si jamais je me la coupe pour aller au ciel!



MORT-AUX-RATS. - Je n'aurai non plus garde de mettre à mal cet article. D'autant qu'à ce qu'il m'a été dit, il est possible de s'amuser en enfer... (Il rit d'un air entendu)



LE MAITRE D'ÉCOLE (de plus en plus ivre) - Cependant il m'en arriva un soir une bonne. Comme
j'étais allé faire mes pâques à Hambourg, je rencontrai sur le port une femme d'environ trente ans qui me demanda la charité et me proposa d'autre part une petite entreprise amoureuse. Pour le coup, je ne refusai point. Je la suivis dans une venelle déserte où elle me fit placer debout contre un mur et se mettant à genoux devant moi, me sortit la verge et commença de me jouer là-dessus un air de flûte dont on n'a pas idée au Conservatoire.



MONROC. - Quelle belle histoire tu nous chantes là!



MORT-AUX-RATS. - Cela n'est point honnête.



LE MAITRE D'ÉCOLE. - Les caresses de sa langue me transportaient dans des régions sublimes où ce n'étaient que femmes et membres dans la plus aimable confusion. La garce, qui était certes de première force à cet exercice, baissa mes culottes, se mit à me lécher avec une grande délicatesse depuis le trou du cul jusqu'au bas des couilles et quoique je lui eusse déjà envoyé un enfant dans la bouche, je rebandai incontinent. Elle m'enfonça un doigt dans l'anus et, sans interrompre son travail, atteint à la couronne de ma verge et s'en fiert un grand coup dans le gosier. Je ne vivais plus, je nageais dans un nuage, noyé du foutre que je lâchais sans arrêt.



MORT-AUX-RATS. - Tu commences de me rendre la queue passablement belle avec tes récits.



LE MAITRE D'ÉCOLE. - Et vois cela m'émeut encore. N'est-il rien de mieux, ni de plus doux qu'un souvenir?

Puis elle me donna encore une fois une vigueur nouvelle, mais pour varier un peu, elle s'étendit sur le dos, couvrit sa robe et me plaçant la queue entre ses seins, qu'elle tenait rapprochés et serrés, elle m'engagea à opérer par petites secousses. Le voyage fut cette fois un peu plus long, J'avais déjà fourni un bien long trajet; je m'attardai quelque temps entre les calebasses que m'offrait la gouge, laquelle du même pas me suçait délicieusement le nombril. Enfin, au mouvement de mes cloches, je sentis que l'heure des vêpres approchait, et j'inondai la poitrine de ma belle d'un torrent d'eau amidonnée dont elle reçut quelques bouillons dans la figure. Quel frémissant, quel miraculeux spectacle! On eût dit les chutes du Rhin devant Schaffouse.



MONROC. - Ah! quelle belle leçon tu nous donnes! Que n'ai-je encore l'âge d'aller à tes cours!



MORT-AUX-RATS. (déjà ivre). - j'imagine que ma chemise doit en prendre, mais je ne sais ce que je lui verse : ou si j'urine, ou si je fous!



LE MAITRE D'ECOLE. - Nous nous levâmes ensuite, agréablement rompus, et sous la lune molle d'avril nous cheminâmes enlacés dans les quartiers endormis de Hambourg où nul témoin ne venait nous déranger. Seuls, les fenêtres, les maillets des volets peints en vert assistaient à nos caresses. J`avais une main entre les fesses de ma compagne et celle-ci s'était à nouveau emparée de mon instrument qu'elle pétrissait sans vergogne.

Nous nous dirigeâmes ainsi vers la sortie de la ville; de minute en minute une brise, un zéphyr ineffable venait nous embrasser, et ma verge et ses ballonnets que j'avais laissés hors de ma brayette en recevaient une douceur nouvelle. Il me semblait alors qu'ils allaient s'envoler vers un paradis oriental, vers un harem uniquement composé de prix de beauté, où langues et fentes ne leur laisseraient point de répit. C'est dans cet agréable moment, quand les ondes de l'amour expiraient adorablement dans mes fesses, que les airs les plus lascifs et les plus mélodieux vinrent surprendre nos oreilles.

Si j'expire d'être misée
Amour que ton aile m emporte!
Par le nectar qu'un vit m'apporte
Il m'est si doux d'être arrosée

Douceur des vers de Lamartine
Je sens tes effets dans mon coeur
Mais plus doux est le chant vainqueur
Que me fait entendre une pine!






Alfred Jarry
 





Dim 11 mai 2008 Aucun commentaire